L’enjeu économique :
Sous la pression des pays du tiers monde voulant instaurer un nouvel ordre économique est apparue la notion ZEE, zone dans laquelle l’Etat exerce des droits souverains en ce qui concerne l’exploration et l’exploitation des ressources naturelles, biologiques ou non biologiques du fond de mer, de son sous-sol et des eaux sur jacentes.
En septembre 1979, l’un des gisements les plus riches en nodules et plaques poly métalliques de cuivre, nickel, cobalt et manganèse était découvert dans la zone à plus de 4000 mètres de profondeur. La densité des gisements dans l’océan indien occidental serait de 5 à 10 fois supérieure à celle des gisements les plus intéressants dans le Pacifique. L’exploitation n’est pour l ‘instant guère envisageable mais les progrès de la science devraient le permettre un jour.
Le représentant de la RDM à l’ONU déclarait en 1979 : ces îles peuvent être utilisées comme point d’appui pour l’exploration et l’exploitation des ressources marines et des fonds marins dans les zones qui leur sont dévolues. cela explique pourquoi la souveraineté sur ces îles est si âprement disputée. les ressources marines et les fonds marins autour de ces îles doivent être utilises au profit du peuple malgache plutôt qu’a celui d’une puissance industrialisée ».
Mais le RDM redoute encore plus encore l’utilisation par le France de ces îles comme points d’appui sur le plan stratégique.
L’enjeu stratégique :
Plus de deux millions de tonne de pétrole passent chaque jour au large du Cap, de l’Océan Indien dans l’Atlantique. A lui seul, le pétrole représente un enjeu considérable pour ce qui est l’approvisionnement en énergie de l’Europe et del’Amérique du Nord. Le sabotage et la fermeture du canal de Suez est une éventualité qu’on ne peut écarter. Cela pourrait donner à la route du cap encore plus d’importance. De toute façon, la faible profondeur du canal oblige les grosses unités à emprunter le Cap de Bonne Espérance.
Les possessions françaises dans le Canal du Mozambique et en particulier leurs pistes d’aviation verrouillent totalement l’espace marin entre l’Afrique et Madagascar.
Pour ne pas être repérées, les unités de surfaces seraient forcées de naviguer à l’est de l’île MAURICE en cas de conflit. La militarisation de ces îlots est une perspective lointaine, vu le prix de revient du processus comparé à son utilité en temps de paix. Mais cette possibilité est un excellent moyen de dissuasion, associé aux bases de DJIBOUTI et de la REUNION. Le retrait de la Royal Navy de l’océan Indien, à l’exception de DIEGO GARCIA a, par ailleurs, laissé le champ libre à la flotte Russe et à l’influence de la Chine populaire en Afrique Orientale. Le maintien de la présence française sur les îles éparses a donc officiellement pour finalité ne pas « ouvrir du vide » à d’autres puissances nucléaires et maritimes, notamment l’URSS. La France n’a pas l’intention de faire de ces îles des « porte-avions fixes » pour protéger les voies de navigation des pétroliers mais elle entend éviter que d’autres puissances le fassent et puissent bloquer le passage.
LES REVENDICATIONS MALGACHES :
On comprend mieux maintenant l’enjeu formidable, à bien des plans, que représente JUAN DE NOVA et des îles sœurs. A partir de 1972, l’affaire des îles éparses devient une « pomme de discorde » durable dans les relations franco-malgaches. Quelles sont donc les positions des deux pays dans ce conflit ?
La souveraineté Française :
Pour la France, l’A.G. des nations unies n’a aucun arbitrage à faire puisque ces îles constituent incontestablement des terres françaises. L’A.G. s’ingérerait alors dans les affaires de la République Française.
En effet, ces îles sont devenues possessions françaises au siècle dernier en vertu du droit de l’occupation effective des territoires inhabités et sans maître. Certes, l’occupation effective n’a pas été réalisée en 1897 mais l’occupation, même symbolique, des îles éparses est valide au regard du droit international public puisque le jugement, contesté par aucune puissance étrangère reconnaît, en 1931, à la France sa souveraineté sur l’îlot Clipperton (Pacifique) dans une situation semblable.
Depuis le décret du 1/4/1960, la France a accompli, par ailleurs, de nombreux actes de souveraineté et l’administration sur les îles comme le rattachement au tribunal d’instance de ST DENIS en 1962, ou la nomination du délégué du gouvernement pour l’administration des îles et son adjoint. Le 20/7/1979, un accord de pêche est signé qui peut-être interprété comme une reconnaissance implicite de la souveraineté Française sur les îlots du Japon. De surcroît, la présence depuis 1973 de parachutistes, Gendarme et météorologistes français permet d’ évoquer désormais le titre d’occupation réellement effective des îlots.
Par ailleurs, le gouvernement Malgache a pris acte, lors de la signature des accords de coopération, du décret du 1/4/1960. Il a reconnu la souveraineté de la France sur ces îles et a d’ailleurs rendu les dossiers administratifs. La validité de ce décret n’a jamais été contestée depuis 12 ans.
Le fondement de la revendication Malgache :
L’argumentation essentielle du gouvernement Malgache consiste à dire que les îles éparses étant des territoires étatiques Malgaches avant la colonisation de la grande île par la France, puis des dépendances administratives de MADAGASCAR jusqu’au 1/4/1960, date à laquelle elles ont été détachées de la grande île sans consultation préalable du peuple malgache. Aucun Etat indépendant n’est plus proche de JUAN DE NOVA que MADAGASCAR. La théorie de la contiguité territoriale voudrait donc que ce soit une dépendance naturelle de MADAGASCAR, dépendance confirmée par la loi de 1896. TANANARIVE réfute la thèse française du « res nullius » en affirmant d’une part qu’elle dépendait du Royaume de MADAGASCAR avant la colonisation.
D’autre part, le gouvernement Malgache invoque la violation de la règle de l’intégrité territoriale d’un pays colonie puisque jusqu’en 1960, ces îles ont toujours été considérées comme dépendance de MADAGASCAR. De même, il invoque la violation du principe de droit des peuples à disposer d’eux même puisque le décret du 1/4/1960 a été fait de façon unilatérale sans consultation préalable avec l’autre partie du moment où des négociations bilatérales sur l’indépendance de MADAGASCAR étaient en cours. Le référendum d’autodétermination est impossible faute de population autochtone mais le référendum de 1958 se prononçait pour le maintien de MADAGASCAR au sein de la communauté Française et pour le statu quo territorial. Le décret de 1960 va à l’encontre de ce statu quo.
L’internationalisation du conflit :
Ce conflit comme nous l’avons vu en étudiant l’enjeu stratégique des îles éparses, a évidemment une internationale. De fait le 22/5/1973, à l’issue des négociations sur les nouveaux accords de coopération franco-malgache, le ministre des affaires étrangères D. RATSIRAKA déclarait que le litige pourrait être amené devant la cour internationale de justice.
Un télégramme du 10/02/1976 au secrétariat général des Nations Unies adressé par D. RATSIRAKA, nouveau président de la RDM réaffirme les « droits historiques » sur les îles. En septembre 1978, il déclare encore au journal « Le Monde » : … « ces îles appartiennent à MADAGASCAR ».
La 16ème conférence des chefs d’Etat ou des gouvernements de l’O.U.A. déclare le 20/7/1979 que « Les îles….. font partie intégrante du territoire nationale de la RDM » et invite la France à rétrocéder à la RDM ces îles en question. La déclaration finale de la 16ème conférence des chefs d’Etat ou des gouvernements des non alignés tenue à la Havane en septembre 1976, exige que … » Ces îles soient restituées à la RDM dont elles étaient arbitrairement séparées en 1960 », décret de l’ancienne métropole.
Ces deux résolutions adoptées, la RDM a attiré l’attention des Nations Unies sur ce problème dans un mémoire adressé le 12/11/1979 au secrétaire général. Le 12/12/1979, l’assemblée générale adopte la résolution 34/91 qui réaffirme la règle de l’intégrité territoriale coloniale et « invite le gouvernement français à entamer sans plus tarder des négociations avec le gouvernement malgache en vue de la réintégration des îles précitées séparées arbitrairement de MADAGASCAR ».
D. RATSIRAKA et maintenant Marc RAVALOMANANA gardent depuis quelque temps la question des îles en sommeil, comme un atout de réserve, prenant grand soin de ne pas envenimer les relations franco-malgaches puisqu’il est, depuis 1985, un actif demandeur d’aides de toute nature.
Source : http://monsite.orange.fr/ile_de_juan_de_nova/page7.html
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