Déclaration du Collectif d’enseignants chercheurs de l’Université d’Antananarivo, Madagascar
En tant qu’éducateurs et citoyens à part entière en poste à l’Université d’Antananarivo, nous, enseignants chercheurs de l’Université, déclarons que:
1) Nous ne pouvons pas tolérer le silence face à la médiatisation à outrance de mensonges et de tromperies à l’intention du peuple malgache, orchestrée par ceux qui déclarent exercer l’autorité.
2) Nous refusons d’être les simples spectateurs des actes de terreur, de vols et d’assassinats perpétrés par une coalition de mutins et de civils résolus à toutes les dérives violentes, parce que les armes de guerre sont entre leurs mains.
3) Nous ne pouvons pas être neutres dans le contexte actuel : on ne peut être pour la vérité et tolérer l’imposture, pour la légalité et accepter un coup d’état.
4) Nous nous élèverons courageusement contre toute velléité d’instaurer un système contraire à la morale chrétienne.
EN CONSEQUENCE:
- Nous dénonçons la prise de pouvoir par la force et la mise en place d’un simulacre d’autorité qui ne repose sur aucun fondement légal. Madagascar est un Etat républicain et démocratique. Les valeurs démocratiques et républicaines, jointes à la vertu malgache du Fihavanana sont celles qui doivent être enseignées et transmises. Le coup d’état qui a été perpétré est une honte pour nous, éducateurs; il est le signe d’une lacune éducative et nous devrons y remédier.
- Nous nous élevons contre tous les comportements qui s’opposent à l’éducation et à la formation d’une descendance digne et citoyenne. Nous nous efforçons de former une progéniture remplie de sagesse, alors que le spectacle donné actuellement et quotidiennement par le régime putschiste s’oppose à ces valeurs et constitue une véritable honte pour nous tous aux yeux de nos enfants.
- Nous déclarons que l’Armée a outrepassé ses attributions et son devoir légal défini par son statut. Elle a pris partialement parti et usé des armes lourdes et légères dans le coup de force pour renverser un pouvoir légal, puis exercé une terreur permanente sur tous ceux qui n’acceptent pas la HAT.
- Nous condamnons l’usage de la force sur les simples citoyens, hommes d’église, journalistes, etc. Nous condamnons les vols des biens de simples citoyens et des biens de l’Etat, perpétrés par des coalitions de militaires et de gendarmes sans foi ni loi. Nous appelons ainsi tous les patriotes à dénoncer et à s’opposer avec sagesse à de tels actes.
- La population, les citoyens de ce pays en ont plus qu’assez aujourd’hui de l’Armée. Ceux dont on disait qu’ils étaient « les cornes qui protègent le poitrail » ont complètement perdu leur honneur à cause du comportement d’une minorité d’entre eux, parce que « le hitsikitsika qu’on croyait ami s’est transformé en épervier et a enlevé les poussins ».
- Nous exigeons le respect strict de la démocratie et dénonçons le baillonnage exercé par la HAT. Chaque jour démontre une volonté de verrouiller les informations, afin de pouvoir médiatiser des mensonges pour conforter un pouvoir volé et mal ancré. C’est ainsi que des militaires sont envoyés pour terroriser, vandaliser et fermer Radio Fahazavana et Radio Mada. Ces exactions n’ont été précédées ni d’avertissement ni de mise en demeure et se sont traduites, à trois reprises, par un cambriolage total des locaux des deux stations radio. Les journalistes ont ensuite été harcelés, terrorisés, à tel point que certains ont dû fuir par crainte pour leur vie.
- Nous condamnons la création de la Cellule d’arrestation et de la Commission Nationale Mixte d’Enquête (CNME) à Ambohibao, Antananarivo.
- Nous appelons la HAT à libérer sans délai toutes les personnes arrêtées à cause de leur conviction politique.
- Nous constatons que tout ce qui a cours aujourd’hui dépasse l’entendement et la mesure, et nous ne le considérons plus comme la simple affirmation d’une position politique mais comme un acte de haute trahison envers la patrie, un total irrespect de l’Eglise et un pur mépris des valeurs malgaches. Aussi en appelons-nous à tous les Malgaches, d’ici et de la diaspora, à nous rejoindre en tant que témoins de la vérité.
- Nous appelons enfin tous les Malgaches à n’accorder ni crédibilité ni reconnaissance à ce pouvoir illégal pris par la force des armes, ni aux institutions et structures par lui mises en place.
Antananarivo, le 18 juin 2009
Pour le Collectif
Le Coordonnateur, Hasina A.