GTT Monde1
Une réunion du Groupe international de contact sur Madagascar (GIC) a débuté hier, 6 octobre 2009, dans la capitale malgache, Antananarivo, sur les voies et moyens de résoudre la crise politique qui prévaut à Madagascar depuis mi-mars 2009. Selon l’ancien président mozambicain Joaquim Chissano, médiateur principal, cette réunion aurait pour but d’aligner la position de la communauté internationale sur le cas Madagascar. Aligner car, il n’est plus un secret que la France, par exemple, a des attitudes « bienveillantes » à l’égard du régime putschiste malgache qui, non reconnu par la Communauté internationale (CI), s’est vu privé du droit à la parole à la toute dernière Assemblée générale de l’ONU. La délégation française à cette réunion d’Antananarivo est d’ailleurs dirigée carrément par un membre du gouvernement français : le Secrétaire d’Etat à la Coopération et à la Francophonie Alain Joyandet.
« Aligner » la position de la CI veut-il dire « aligner » cette position sur celle de la France ? Autrement dit, « s’aligner » contre Ravalomanana ?
Participent à cette réunion, que beaucoup qualifient de « rencontre de la dernière chance », une cinquantaine de personnalités représentant, entre autres, les entités et pays suivants : les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU (Etats-Unis, Chine, Royaume-Uni, France et Russie) ; le Secrétariat de l’ONU ; la Commission de l’UA (dont la délégation est dirigée par le président Jean Ping lui-même) ; la Lybie (qui assure actuellement la présidence de l’UA) ; la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe – dont Madagascar est membre) ; la COI (Commission de l’Océan indien – dont Madagascar est membre) ; le COMESA (Marché commun d’Afrique orientale et australe – dont Madagascar est également membre) ; l’OIF (Organisation internationale de la Francophonie) ; et l’UE (Union européenne), premier bailleur de fonds multilatéral du pays. Bref, des pays et entités qui, à part la France, ont été toujours fermes dans leur condamnation du régime putschiste d’Antananarivo.
Mais au vu :
du regain de confiance du leader putschiste malgache, Andry Rajoelina, à son retour de Paris après avoir été privé de parole à la dernière Assemblée générale de l’ONU ; regain de confiance qui l’a aidé à (1) ne pas se montrer trop dur envers la SADC, son bourreau de New York ; (2) à confronter son compagnon de route devenu un véritable fardeau, son « Premier ministre » Monja Roindefo ; et (2) à se proclamer, avec assurance, Président de la Transition avant l’heure lors de son discours controversé du dimanche 4 octobre ;
du fait que la CI a, pendant ces six mois de crise, condamné le putsch sans jamais condamner les putschistes, ni même les menacer de sanctions individuelles dites « ciblées » qui auraient pu être appliquées pour le contexte malgache ; et enfin
de la tergiversation des mouvances Albert Zafy et Didier Ratsiraka à rallier la mouvance Ravalomanana dans les manifestations contre la mauvaise foi manifestée par la mouvance Rajoelina à appliquer pleinement les Accords de Maputo, tergiversation qui semble confirmer que l’alliance des trois mouvances n’était en fait qu’un simple camouflage des véritables intentions ;
il semble clair que l’heure est venue pour toutes les parties susmentionnées, tant malgaches qu’étrangères, d’écarter définitivement Marc Ravalomanana de la scène politique malgache.
Et « légitimer » le putsch de mars 2009 par un autre putsch cette fois-ci « diplomatique » ?
En fait, les dés semblent jetés à partir du moment où le Président de la Commission de l’UA, M. Jean Ping, daigne accorder une certaine considération au pseudo-chantage formulé par Rajoelina, deux jours auparavant, à l’endroit de la CI, à savoir qu’il (Rajoelina) ne mettrait en application les Accords de Maputo que si la communauté internationale s’engageait d’abord « par écrit » à ne pas appliquer les sanctions envisagées contre Madagascar et à ne plus suspendre ses financements.
En tout cas, si le scénario brossé ci-dessus est vérifié :
il ne s’agirait ni plus ni moins qu’une « légitimation » du putsch de mars 2009 par un autre putsch cette fois-ci « diplomatique et internationale » ? Car, qu’on le veuille ou non, écarter Ravalomanana du jeu c’est renverser un président élu : Ravalomanana reste en effet le président élu tant que les Accords de Maputo ne sont pas appliqués ;
il ne s’agirait que d’une solution de facilité qui risque d’embraser le pays lors des prochaines élections surtout présidentielles (à moins que celles-ci ne seraient reportées indéfiniment) ;
il ne s’agirait que d’une solution rafistolée car l’on n’a pas encore épuisé toutes les ressources de ces fameux Accords de Maputo, à savoir les volets « neutre » et « pacifique » de la Transition prévue dans lesdits Accords – à moins qu’on ait intentionnellement escamoté ces deux volets pour se focaliser sur un consensus « introuvable », car Andry Rajoelina serait purement et simplement disqualifié si ces critères étaient mis sur le tapis ;
il ne s’agirait enfin que d’un accommodement purement politico-diplomatique qui fait fi de l’intérêt de la majorité de la population malgache, intérêt qui se situe davantage dans les retombées d’une véritable stabilité politique que dans une « solution » susceptible de générer plus de problèmes qu’elle n’en résout.
Bref, vers une autre « solution » qui génère plus de problèmes qu’elle n’en résout ?
Le 17 mars 2009, le pouvoir a été pris par la force des armes à Madagascar. Ce pays est certes connu de ses voisins pour ses crises politiques cycliques mais il est aussi apprécié par beaucoup pour sa beauté naturelle et pour la douceur et la non-violence de sa population. Menée avec l’intervention d’une partie de l’Armée, cette prise de pouvoir, qui n’est donc autre qu’un coup d’Etat ou putsch militaro-civil, force le président élu Marc Ravalomanana, persécuté par les putschistes, à partir en exil en Afrique du Sud. Si ce putsch semblait au départ plus ou moins justifié pour une certaine partie de la population malgache se disant « victime » du régime Ravalomanana, une frange importante de cette même population s’est rendue compte très vite que la « solution » a généré plus de problèmes qu’elle n’en a résolus.
Six mois après - le 7, 8 ou 9 octobre 2009 -, après un calcul savamment conçu et des manœuvres politico-diplomatiques menées de main de maître, la communauté internationale et les putschistes malgaches (et leurs sponsors) décident de « légitimer » le putsch de mars 2009 par un putsch « diplomatique » qui confie les rênes du pouvoir à un « putschiste à la face d’ange », Andry Rajoelina. La bataille est gagnée, mais pas la guerre. Les mêmes causes produisant les mêmes effets pour la même maladie, cet autre putsch, aussi subtil et « diplomatique » soit-il, ne manquera pas de générer plus de problèmes qu’il n’en résoudra.
Car nous sommes à Madagascar, un pays où la diversité ethnico-raciale a toujours été très mal gérée. Un pays où en 2009, pour la première fois dans son histoire politique post-coloniale, un embryon de « culture des valeurs » émerge à travers le mouvement majoritairement citoyen et international des « légalistes » (par opposition à la « culture des personnalités » qui prédomine dans la vie politique nationale). Enfin un pays où en 2009 également, et pour la première fois également dans son histoire politique post-coloniale, de simples paysans sont venus grossir les rangs des manifestants dans certaines villes du pays.
Le doute, l’incertitude, l’angoisse et la peur s’installent dans le pays
Depuis le putsch de mars 2009, presque quotidiennement, beaucoup ont été témoins d’excès et d’abus de toutes sortes de la part du nouveau régime dit « de transition vers la 4ème République » : pertes de dizaines de milliers d’emplois; cessation d’activités d’un nombre sans cesse croissant d’entreprises ; suspension de la coopération et de l’aide internationales ; paupérisation encore plus grave d’une population déjà classée parmi les plus pauvres du monde ; destruction de biens ; répressions sanglantes, arrestations arbitraires et détentions préventives « prolongées » de manifestants contre le régime putschiste ; entraves à la liberté de réunion et d’expression ; muselage de la presse ; violations flagrantes de certaines règles élémentaires du Droit ; actes d’intimidation, de terreur ainsi que rackets et pillages de la part des forces de l’ordre ; magouilles et corruption effrénées à tous les niveaux ; résurgence de l’insécurité urbaine et rurale.
Le doute, l’incertitude, l’angoisse et la peur s’installent dans le pays, perturbant les esprits, bouleversant les mœurs, meurtrissant les cœurs. La population est à bout et les colères – si savamment réprimées au pays de la douceur - commencent à se libérer… Or, ce sont les injustices bien plus que la faim qui, dit-on, incitent les peuples à la révolte.
Pour l’instant, le GIC n’a pas encore rendu public un communiqué officiel sur les résultats de ses délibérations. Mais, chose étrange, certains médias malgaches et étrangers confirment déjà qu’Andry Rajoelina a été choisi pour diriger la Transition ; ce qui, répétons-le, ne peut être conforme à l’objectif d’une Transition « neutre », « pacifique », « inclusive » et « consensuelle » convenue dans les Accords de Maputo. Ces informations véhiculées par les médias malgaches et étrangers feraient-elles donc partie de ces fameuses fuites calculées d’informations visant à préparer psychologiquement les esprits ?
Espérons que le GIC, lors de sa présente réunion d’Antananarivo, opte pour une solution conforme non seulement à la lettre et à l’esprit des Accords de Maputo mais aussi aux valeurs universelles du 21e siècle et aux valeurs fondamentales malgaches. Car le Malgache éternel, s’il est si « doux », si accommodant et si épris d’harmonie sociale, c’est qu’il est justement très, très sensible aux notions d’ordre et de stabilité, de justice et de dignité.
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1 GTT Monde est le réseau mondial des « Collectifs GTT » (Gasy Tia Tanindrazana - Patriotes malgaches) basés dans différents pays et continents. Nés au lendemain du coup d’Etat militaro-civil survenu à Madagascar le 17 mars 2009, coup d’Etat qui a mis en place un régime putschiste qui a fait des morts, des blessés et des dégâts socio-économiques et écologiques importants, les « Collectifs GTT » sont des organisations citoyennes de nationaux malgaches et de ressortissants étrangers d’origine malgache qui, bien que résidant à l’extérieur du pays, dénoncent ledit coup d’Etat et militent pour le retour à la légalité, à l’ordre constitutionnel et l’avènement de la primauté du Droit à Madagascar. Dénommés ainsi « légalistes » - comme des millions de leurs compatriotes dans leur pays -, les Collectifs GTT militent également pour le retour au pays de la personnalité qui incarne cette « légalité » : le président élu Marc Ravalomanana qui vit aujourd’hui en exil forcé en Afrique du Sud, après avoir été chassé du pouvoir par la force et ensuite persécuté par les putschistes.
Discours du président Ravalomanana
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[image: vih 09 120430 Tafa mivantana nataon'ny PRM]
Il y a 12 ans
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