Depuis quelques mois la population de Madagascar assiste sans comprendre à l'organisation d'une tentative de coup d'Etat en règle. La collusion d'une couverture médiatique par AFP, RFI et France24 particulièrement intense des événements pour ce petit pays généralement oublié des médias et surtout la lecture strictement unilatérale qui en est donnée rappelle les malheureuses pratiques chères au ministre des affaires étrangères françaises relevées dernièrement par Péan.
Depuis le 24 janvier, Andry Rajoelina, le maire d'Antananarivo, la capitale, est en effet présenté par les médias comme le porte-parole du « raz-le-bol » d'une population « appauvrie par le pouvoir ».
Le 26 janvier, alors que la manifestation qu'il organise conduit à l'incendie de la télévision, de la radio nationale et de ses archives entièrement détruites, puis au saccage de différents magasins, on montre surtout les morts et les blessés comme s'il s'agissait d'autant de martyres de la cause populaire. Après cet épisode sanglant, les manifestants déjà beaucoup moins nombreux que ce qu'affirmaient les médias étrangers se font encore plus rares. On comptait plus que quelques milliers de fidèles aux meetings suivants. Cela n'a pas empêché le 31 janvier à l'envoyé spécial de France24, Franck Berruyer, de faire un commentaire quasi hystérique après que le jeune maire ait déclaré prendre la tête d'un gouvernement de transition: « ...le cortège du Président [il parle du maire] est parti entouré par des gardes du corps...une dizaine de milliers de personnes se sont rassemblés pour attendre une décision historique...une espèce de révolution démocratique à l'Ukrainienne...».
Puis, malgré l'absence de supporters la population a été invitée à ne pas participer à des manifestations incontrôlables la mécanique de l'affrontement a pourtant continué son chemin comme si l'issue, la prise de pouvoir, était à atteindre coûte que coûte.
Samedi dernier la tentative de s'introduire de force dans le palais présidentiel a mené à l'issue attendue: des dizaines de morts, des centaines de blessés. La presse étrangère continue pourtant de parler des « forces de l'ordre qui tirent sur des manifestants ». Or, sur place on ne sais pas vraiment qui sont ces « manifestants » et si ce sont les forces de l'ordre qui ont tiré sur eux.
Parallèlement, le 26 janvier, Bernard Kouchner appelait officiellement les protagonistes au dialogue contactant du même coup un certain Roland Ratsiraka allié d'occasion à Andry Rajaoelina, et neveu de Didier, ex dictateur au pouvoir à Madagascar de 1972 à 2002 actuellement en exil à Paris. Cette « invitation au dialogue » n'était envisageable que dans la mesure où le mouvement émanait réellement d'une contestation populaire et non d'un groupe que l'on pourrait qualifier de terroriste sans avoir peur de surenchérir.
Madagascar est une ancienne colonie française dont la « colonie » actuelle est aujourd'hui encore la plus importante en terre étrangère. C'est aussi l'un des derniers bastions de la francophonie bien que seulement 6% de la population soit capable de s'exprimer dans cette langue. C'est aujourd'hui encore le plus important partenaire commercial de la France et l'un des principaux bailleurs bilatéraux. La politique étrangère française ne peut donc pas se désintéresser de Madagascar. La découverte d'important gisements miniers et la possibilité nouvelle d'extraction pétrolière sont autant de raisons de s'y intéresser.
Or, le Président Marc Ravalomanana a montré, depuis son arrivée en 2002, une volonté claire de réduire la dépendance de son pays face à la trop grande influence de la France (qui comptait au moins un conseiller spécial par ministère avant son arrivée). Quelques exemples, le nouveau programme scolaire annonce le retour du Malgache à l'école, la privatisation de la société de téléphone a échappé à France Telecom, celle de la société d'électricité serait retardée pour empêcher EDF de la racheter à trop bas prix. Cette compagnie comme la compagnie aérienne nationale (Air Madagascar) a été mise sous gérance de sociétés allemandes. Cette dernière fait la nique à Air France en s'offrant le luxe d'ouvertures vers Singapour, l'Afrique du Sud, l'Italie, etc.
Une concession pour la distribution du pétrole a bien été remportée par la société Total cependant. Mais, depuis quelques moins, le torchons brûlent entre celle-ci et le Président qui accuse les distributeurs de maintenir un prix de vente élevé alors que le prix du baril a chuté. Aujourd'hui en effet, le prix de l'essence à la pompe est pratiquement le même qu'en France alors que les taxes sont bien moindres et que le salaire moyen est au moins dix fois inférieur. Le Président a même proposé dernièrement de fonder une nouvelle société d'État pour pouvoir ramener l'essence à un prix plus juste.
Entre l'acharnement de la presse officielle française, l'insistance des affaires étrangères à forcer le Président au dialogue avec les putschistes et l'agacement des grands groupes face à l'ouverture prônée par le Président, on peut vraiment se demander si la Françafrique est réellement enterrée.
www.madonline.com | 08/02/2009 | 21:29:59
Discours du président Ravalomanana
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[image: vih 09 120430 Tafa mivantana nataon'ny PRM]
Il y a 12 ans
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